IEP: Après le scandale du Livret du Ch’ti Bizuth : une charte de communication des associations insuffisante. Top 6 des punchlines de la dernière réunion par nos co-élu.e.s 2


Comme nous vous l’avions annoncé, nous nous sommes retrouvé.e.s entre élu.e.s étudiant.e.s sous l’égide de M. Giuliana (le responsable associatif) pour élaborer ce que nous pensions être un premier jet pour la rédaction de la Charte de communication des associations.

 
Rappelons que l’existence d’une telle Charte avait été décidée lors des Etats Généraux (et plus ou moins en amont par les élu.e.s étudiant.e.s). Son but : définir les règles pour la gestion collective des deux panneaux de la cafétéria, que le directeur nous a gracieusement accordé pendant une période d’essai de 2 mois. 
Où seraient les clés, quelle taille d’affiches, quelle durée d’affichage ou nombre d’affiches par associations, voici toutes les questions que les autres élu.e.s jugeaient primordiales. Pour elles et eux le but clairement affirmé était de permettre de débuter cette période d’essai le plus vite possible. Et de faire en sorte de satisfaire la direction pour que celle-ci, nous ayant trouvé.e.s bien sages,nous laisse à la rentrée prochaine afficher (librement ?) dans TOUS les panneaux de l’IEP. Incroyable non ? Enfin,cette liberté d’affichage promise n’est pour l’instant qu’une promesse, comme la carotte tendue pour tenir les associations et les forcer à plaire à la direction. 
 
Mais ce qui était important pour le syndicat Sud Solidaires Etudiant-e-s notamment après l’affaire du Ch’ti Bizut, était qu’elle permettrait d’affirmer l’interdiction de tout propos discriminant. C’était la seule raison pour laquelle nous avons accepté de participer à la rédaction de cette charte, dont nous soupçonnions qu’elle soit encore un moyen d’infantiliser les étudiant-e-s. Il s’agissait aussi de préciser ce que nous entendions derrière les mots « sexisme » ou« discriminations » en règle générale, pour ensuite ensemble se mettre d’accord avec les autres élu.e.s  sur ces significations. Il faut bien préciser : « ce que nous entendons » ne se fonde pas sur des hypothèses hors-sol, mais sur les expériences des personnes concerné.e.s quant aux discriminations qu’elles vivent. C’est pourquoi nous avions écrit une charte précisant ce qu’étaient des contenus sexistes, LGBTQIA+phobes, racistes, classistes, etc…
 

La démocratie oui, mais l’efficacité avant ! 

 
Mais avant de débuter la rédaction nous voulions nous assurer que cette Charte pourrait ensuite être amendée par les associations et qu’elle ne serait pas définitive le jour-même après notre petite réunion à 9, ne se basant que sur des grandes orientations définies lors des Etats Généraux. 
On nous explique que les élu.e.s étudiant.e.s seraient légitimes pour cela puisque « nous représentons les étudiant-e-s ». C’est certes vrai dans une certaine mesure (celle des 64%d’abstention) mais nous n’avons pas été élu.e.s sur notre proposition de Charte de communication des associations ; celle-ci doit donc être soumise aux étudiant.e.s.
Après avoir tenté de défendre le mandat impératif qui nous est cher et affirmé que les élu.e.s étudiant.e.s ne sont pas un Conseil des sages supérieur aux autres étudiant.e.s, nous avons été contraint.e.s de céder.
Et c’est sous couvert d’efficacité, du temps qui nous rattrape et qui nous enjoint à précipiter les choses pour que ces deux mois d’essai soient effectifs, que nous avons dû accepter que la Charte soit présentée par les élu.e.s puis signée par les associations.
 
Mais, nous a-t-on promis, que pendant cette période d’essai les associations pourront observer les dysfonctionnements dans la pratique, pour à la fin de ces deux mois, modifier cette Charte.
 

Point Charlie Hebdo : « Mais il y a la liberté d’expression »

 
Après s’être rassuré.e.s sur les choses pour lesquelles nous étions d’accords(eh oui, Sud est d’accord pour autoriser des affiche A3 ou deux affichesA4 par associations!), il a fallu s’attaquer au point polémique, soit notre proposition de Charte (http://www.sudetudiantlille.org/2016/02/iep-notre-proposition-de-charte-de-communication-des-associations/)
Parce que quand il s’agit de parler de discriminations : ça clash.Nous avions en effet décidé d’écrire une Charte décrivant très précisément ce qui était discriminant ou pas, dans l’idée d’éradiquer le genre de débats Facebook ou de querelles que nous avons eu par le passé, sur des visuels que beaucoup considéraient sexistes tandis que d’autres non. Afin d’éviter ces situations de tension pour tout le monde et surtout afin d’informer les étudiant.e.s que certaines de leurs pratiques peuvent être discriminantes même si ce n’est pas voulu (ça l’est d’ailleurs rarement, peu de personnes se revendiquant racistes ou sexistes), nous voulions que des critères clairs auxquels se référer soient établis.
 
Il existe déjà un article à ce propos dans la charte des associations déjà existante :
« Article 10 : La lutte contre les pratiques discriminantes, dégradantes et humiliantes. 
Toutes formes de discrimination fondées notamment sur l’origine, le sexe, les mœurs, l’orientation ou l’identité sexuelle, l’âge, la situation de famille, les opinions politiques, les activités syndicales ou mutualistes, les convictions religieuses, l’apparence physique, le nom de famille, l’état de santé ou le handicap, sont prohibées. Sciences Po Lille veille à l’interdiction des pratiques discriminantes au sein des associations. »
 
Cependant, ce texte n’est ni très complet ni très ambitieux pour une nouvelle Charte, et n’établit pas de critères précis auxquels se référer.
 
Nous avons également été accusé.e.s d’infantiliser les étudiant.e.s et d’être trop répréhensif.ve.s vis-à-vis d’elles/eux. Nous sommes heureux.se.s de voir que pour une fois, les autres élu.e.s sont contre l’infantilisation des étudiant.e.s (tant que ce n’est pas s’élever contre la direction). 
Notre objectif n’était pas de dire aux étudiant.e.s quoi faire ou de les contrôler, mais de leur faire prendre conscience qu’ils/elles (et nous nous incluons évidemment dedans) peuvent avoir des comportements ou des mots discriminants malgré elles/eux. Il s’agit de statuer sur ce qui doit être évité pour ne pas blesser ou reproduire des oppressions
Malgré le fait que les autres élu.e.s semblaient tout à fait d’accord avec le fait de combattre les discriminations, et ont répété plusieurs fois avoir trouvé notre article bien, un obstacle demeurait… Le sacro-saint humour et la liberté d’expression ! Et évidemment nous sommes arrivé.e.s au point godwin « dans ce cas là on supprime Charlie Hebdo », nous montrant même une couverture du journal sur un smartphone (au cas où on ne le connaîtrait pas). Cependant cet argument n’a aucune pertinence. Effectivement,Charlie Hebdo utilise un humour oppressif ; et il est même spécialisé là-dedans, ce qui n’est pas le but des associations de Sciences Po a priori. Ce qui ne veut pas dire que nous légitimons les attentats de Charlie Hebdo (on anticipe les remarques clichés), mais nous ne considérons pas que ce soit une perte que de demander à supprimer l’humour oppressif. Car on ne peut pas rire de n’importe quoi n’importe comment, et la « liberté d’expression » ne veut pas dire liberté de discriminer, ni que celle-ci passe avant l’égalité et la lutte contre les dominations. 

« Alors dans ce cas on va changer le monde »

nous répond-on. Eh oui, ce serait bien camarade, et on va commencer petit à petit avec ton aide !
 

« De toute façon ça n’arrivera jamais, on perd notre temps »

 
Comme les autres élu.e.s,elles/eux respectent les étudiant.e.s et les considèrent comme des adultes, ilest évident pour eux/elles qu’évidemment aucun visuel ou com discriminante n’arrivera (propos soutenu par M. Giuliana par ailleurs, mais qui n’est peut-être pas au courant de ce qui s’est passé l’année dernière). Et c’est à nous de sortir notre point « Livret du Ch’tit Bizut » (même si, nous l’avouons, nous n’y avions pas pensé sur le coup, trop occupé.e.s à se battre pour avoir la parole dans le brouhaha général). Un bon exemple montrant que des dérives existent et que personne ne les dénonce (nous y compris) quels que soient les discours à base de « je ne suis pas raciste ». Il faut accepter que même si nous sommes tou.te.s très intelligent.e.s et responsables, nous n’avons pas toujours conscience,pris dan l’esprit de la blague et la dérision générale, que nous véhiculons des propos impliquant des choses graves.
Notre but est que ce genre de scandale ne se reproduise pas, non pas pour l’« image de Sciences Po Lille » mais à cause de la gravité des propos. 
 
 

Je suis contre les discriminations mais « je me battrai contre le fait qu’on incite les étudiants à avoir une écriture inclusive »

 
« Ecriture inclusive » susurre-t-on : on pousse des hauts cris !
Il ne faut apparemment pas aller trop loin dans la lutte contre les discriminations, nous ont justement rappelé les autres élu.e.s. « Le sexisme, le racisme ok mais l’écriture inclusive c’est non », ont vociféré deux autres éluEs. 
Il y aurait donc un sexisme acceptable et un autre non-acceptable ? Tenir des propos dégradants sur les femmes serait sexiste (et encore ? Qu’est-ce qu’on dit sur « nos pom-poms » ? ) mais écrire « les élu.e.s étudiant.e.s ou « les élus étudiants et les élues étudiantes » ou « les éluEs étudiantEs » serait vraiment exagéré !
Sauf que non. C’est justement ce genre de petites choses qui paraissent aussi insignifiantes mais qui font transparaître clairement que les femmes, ou plutôt les personnes non-hommes,sont invisibilisées dans chaque phrase que nous prononçons. Alors non, nous ne considérons pas que vouloir inclure les personnes non-hommes dans nos écrits soient particulièrement choquant (beaucoup moins que d’assumer le fait de ne pas vouloir être inclusif.ve.s en tout cas).
Par ailleurs, nous rappelons que dans notre proposition de Charte nous avons bien spécifié que « les associations qui souhaitent afficher doivent faire les efforts nécessaires quant à l’inclusivité de l’écriture de leurs affiches », tout cela accompagné d’une formation. Nous sommes loin d’une obligation dictatoriale ou d’un quelconque aspect coercitif, il s’agit d’une incitation à tenter de rendre son écriture plus inclusive.
Cependant, après que ce pointait été longuement débattu, aucun vote n’a été prononcé dessus.
 
 
La décision finale a été celle-ci : à la Charte, qui ne parle au final que de l’organisation pratique de ces 2 mois d’essais, serait ajouté le dixième point de la Charte des associations déjà existante (en annexe ci-dessus) qui renverrait à l’annexe pour plus d’informations sur les discriminations. Or cette annexe serait notre proposition de Charte. Dès lors, l’annexe est liée à la charte qui reconnait sa valeur en termes de définition des discriminations. Les autres élu.e.s se chargeant par ailleurs d’ajouter à la liste des discriminations déjà présente dans l’article 10, les discriminations oubliées (classisme, toxicophobie…), et la situation étant floue par rapport à l’écriture inclusive, elle devrait mécaniquement faire partie du texte.
 

«  Vous ferez des formations, moi je trouve ça très bien les formations…LB…gtgxcvjbhkooùmluiy »

 

Pour nous rassurer sur le fait que notre texte avait été écarté mais qu’on pourrait quand même faire la « pédagogie qu’on réclame », les élu.e.s nous ont assuré que nous pourrions faire toutes les formations que nous voulions : des formations contre le sexisme, des formations LGBTQIA… « XYZ » complète un élu Up après avoir tout le long de la réunion prononcé « LBGT » ou « L…jtfgujpiiyg » au lieu de LGBT+ ou LGBTQIA+ (LesbiennesGaysBisexuel-lesTrans*QueerAsexuel-le et autres).

En effet, proposer des formations auxquelles seules les personnes déjà formées et intéressées viendront, c’est un bon moyen d’écarter le problème, de se conforter dans sa situation d’incompréhension totale des discriminations (au point de ne même pas savoir les nommer) et de ne pas se sentir concerné.e.s par les formations.

 
 
Alors nous sommes ressorti.e.s de cette réunion un peu perplexe : avait-on gagné ? A-t-on réussi à faire en sorte que les définitions précises apportées, sur ce que sont les discriminations systémiques, soient acceptées et respectées par tou.te.s ? Ce qui semblait a priori être une simple mise à l’écart de notre proposition de Charte, pourrait finalement être une victoire de la lutte contre les discriminations, nous verrons bien.
 
Notre seule crainte est la suivante: sur quoi va-t-on se baser lorsque nous nous retrouverons entre élu.e.s, où nous sommes minoritaires,et que nous devrons juger si une affiche doit être enlevée ou non lorsqu’elle a été signalée par un.e étudiant.e comme contraire à la Charte ? 
Le risque est que ce soit à la discrétion des autres élu.e.s et qu’au final, notre Charte anti-discriminations ne soit que des mots et ne soit respectée par personne.
PS: à l’heure où nous publions cet article, le document rédigé par Up, chargé.e.s d’écrire la Charte finale, a été envoyé à M. Giuliana mais pas aux autres élu.e.s. Notre proposition de Charte a été édulcorée ( les exemple ont sauté) mais les discriminations citées restent fidèles au texte initial.

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2 commentaires sur “IEP: Après le scandale du Livret du Ch’ti Bizuth : une charte de communication des associations insuffisante. Top 6 des punchlines de la dernière réunion par nos co-élu.e.s

  • Laurent Curti
    toxicophobie: ,Crainte morbide (phobie) d'être empoisonné par des poisons ou des toxines imaginaires contenus dans les aliments. C'est quoi le rapport avec la Charte ?
  • Jean Luc Méchancon
    "En effet, proposer des formations auxquelles seules les personnes déjà formées et intéressées viendront, c’est un bon moyen d’écarter le problème," C'est sur que Sud en connais un rayon pour organiser des réunions ou ceux qui viennent sont déja tous d'accord ^^