Le régime étudiant de sécurité sociale


Le système en vigueur dans la sécurité sociale à destination des étudiants est une exception française. En France, les étudiants disposent d’un régime autonome, indépendant des autres travailleurs. Ce régime n’est pas géré par un service public (la Caisse Primaire d’Assurance Maladie, CPAM) mais par une « Délégation de Service Public » à des organismes privés dits « mutuelles étudiantes » (la LMDE et le réseau SMER dont la SMENO fait partie).

Il fait l’objet de critiques anciennes, pour certaines aussi vieilles que ce système, mais, ces dernières semaines, de nombreuses révélations ont apporté de l’eau au moulin de ceux, comme nous, qui demandent la fin de la délégation de service public en vigueur et l’intégration totale du régime étudiant au sein de la sécurité sociale.

Le constat de dévoiement total de ce régime, déjà créé à l’origine dans des conditions troubles, est patent.

Le système est devenu tellement compliqué qu’il en est devenu complètement incompréhensible, même pour ceux qui ont pour mission de le faire fonctionner. Cela occasionne des frais de gestion prohibitifs et des tracasseries administratives pour les usagers transformés, malgré eux, en clients piégés par un système sur lequel ils ne peuvent agir et sur lequel ils n’ont aucune prise.

Ces multiples complications administratives sont devenus des véritables obstacles pour l’accès aux soins.

Les structures servant d’intermédiaire entre la sécurité sociale et les étudiants, c’est-à-dire les « mutuelles », sont financés de plusieurs manières :

* Par la collectivité, c’est ce que l’on appelle des remises de gestion. Pour chaque étudiant qui choisit la mutuelle, 52€ sont donnés par an par la sécurité sociale sur les 207€ versés par l’étudiant dans ses frais d’inscription (ils sont payés par la collectivité dans le cas où l’étudiant est boursier) et servent à financer les remboursements de dépenses de santé. Ces 52€ ne servent pas au remboursement, mais juste au fonctionnement administratif des mutuelles (et aussi à la prévention santé, mais en réalité les mutuelles ne font presque rien dans ce domaine hormis les distributions de préservatifs de la LMDE !).

* Par l’étudiant, quand un vendeur de l’une ou l’autre des structure arrive à lui vendre une complémentaire santé, qui très souvent est inutile à l’étudiant. En effet, beaucoup d’étudiant sont déjà couvert par la mutuelle parentale et souscrire à la complémentaire étudiante fait perdre cette couverture en général plus complète et bien meilleur marché. De nombreux autres étudiants pourraient bénéficier, du fait de leurs faibles ressources, de la CMU Complémentaire qui est gratuite auprès de la CPAM.

Les révélations récentes nous apprennent que les conditions de travail au sein des mutuelles étudiantes sont désastreuses, que de l’argent affecté par la collectivité à ces structures sert à financer des organisations étudiantes qui en ont pris le contrôle*.

L’UFC-Que Choisir a calculé que si la gestion était assurée directement par la CPAM, les économies réalisées seraient colossales (cette remise de gestion coûte 93 millions d’euros par an et le même travail fait par la sécurité sociale coûterait autour de 3 millions, soit 90 millions d’euros d’économie)**. Mais l’avantage pour l’étudiant serait surtout ailleurs : la simplification administrative massive engendrée permettrait de réduire considérablement les délais de gestion, d’avoir toujours un interlocuteur correctement formé, de bénéficier d’un réseau d’agences bien plus dense…

Cela permettrait aussi une meilleure reconnaissance des étudiants et de leur place dans la société, considérés comme des individus adultes ayant les mêmes droits que les autres travailleurs et non plus un système bancal offrant une protection sociale au rabais et permettant des financement opaques à des organisations douteuse. Les économies réalisées permettraient aussi d’étendre l’accès à la santé, en finançant une extension de la protection sociale pour les étudiants couvrant entièrement les dépenses de santé.

*voir l’article (« Intérêt général et intérêts particuliers dans la santé étudiante » – 15 juin 2012)

**voir l’article (« Dossier de l’UFC-Que Choisir sur les mutuelles étudiantes – Enfin quelqu’un brise la loi du silence ! » – 12 septembre 2012)

Laissez un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *