Dans le cadre de ses plans d’austérité successifs, le gouvernement a décidé de réduire de 100 millions d’euros les dotations financières (DGF) de certains établissements qui ont des fonds de réserve supérieurs à 65 jours. Dans la région, sont concernées les universités de Lille 2 (- 8,7 millions) et d’Artois (- 24 millions !) ainsi que Centrale-Lille, l’ENSCL, l’ENSAIT et l’IEP de Lille. Au total, alors que notre région est celle qui compte le plus d’étudiant-e-s boursier-e-s, elle contribue à plus d’un tiers de l’ « effort » budgétaire.
La « redistribution » est utilisée ici comme argument d’autorité pour justifier de nouvelles restrictions budgétaires : déshabiller les établissements en moins mauvaise santé financière pour que les quelques postes promis soient financés. En effet, alors que ce gouvernement « redistribue » 100 millions, qui ne sont pas nécessairement pris dans la caisse des établissements les mieux dotés (comme Artois ou Lille 2), il multiplie les appels à projets en « ex » (IDEX, LABEX, EQUIPEX…) qui induisent des inégalités importantes non seulement entre établissements, mais aussi entre formations, entre laboratoires et entre équipes de recherche. Le gouvernement maintient un enseignement supérieur à plusieurs vitesses, entre des écoles, prépas et filières universitaires sélectives surdotées réservées à l’élite et des « facs de pauvres » clairement sous-dotées.
Le montage financier du prélèvement est complexe : le Ministère ne peut prélever directement sur les fonds de roulement. Il va donc réduire la DGF des établissements et les autoriser exceptionnellement à prélever la somme correspondante sur leurs fonds de roulement et à l’utiliser pour assumer des dépenses de fonctionnement…, autorisation qu’il s’obstine habituellement à refuser, l’utilisation des fonds de roulement étant légalement restreinte aux dépenses d’ « investissement ».
Si le gouvernement est le principal responsable, les directions d’établissements ne sont pas innocentes. En multipliant les politiques locales de restrictions budgétaires (comme à Lille 2) ou en augmentant drastiquement les frais d’inscription (comme à l’IEP), les directions de ces établissements sont responsables d’avoir des fonds de roulement appétissants pour le Ministère. Cette mesure n’aura pour effet que de renforcer le cercle vicieux des économies budgétaires, dont sont prioritairement victimes les premiers cycles où la proportion d’étudiant-e-s issu-e-s des classes populaires est relativement forte, avec des conséquences concrètes (TD surchargés, recours croissant à des vacataires précaires…).