Fin de la compensation et des rattrapages, capacités d’accueil et autres scandales (Compte-rendu de la CFVU du 14 février 2018)


 

L’ordre du jour de cette Commission Formation et Vie Universitaire (CFVU) était dense et a été le lieu de beaucoup de révélations, allant dans le sens de davantage de sélection et de privatisation de l’Université.

Quatre points principaux ont particulièrement attiré notre attention, qui confirment nos craintes quant aux dernières lois votées dans l’ESR (Enseignement supérieur et recherche) et nous donnent bien raison d’avoir lutté contre la loi ORE l’année dernière : la fin de la compensation, la fin des rattrapages, la réforme de la PACES et l’utilisation de la CVEC.

Nous nous attarderons ensuite sur une forme de sélection en M2 et un calendrier des rattrapages catastrophique

Contre ces mesures, nous appelons les étudiant·e·s à se mobiliser!

 

1) Fin de la compensation et des rattrapages

 

Le point  » Accréditation des formations 2020-2024″, derrière un titre a priori anodin, concernait en fait l’adoption et l’application de l’arrêté licence ( le truc dans la loi ORE). En ce moment a lieu la « concertation avec les composantes », que Lynne Franjié, la vice-présidente formation ( et cheffe de ce conseil) est en train de rencontrer; la version finale devant être adoptée le 13 mars a priori.

L’objectif serait de créer des blocs de compétences ( BCC) rassemblant des UE en fonction des compétences (mise en valeur des compétences= professionnalisation) mais en plus, il n’y aurait pas de compensation entre ces blocs. Cela revient à une suppression de la compensation entre UE (unités d’enseignement) ne faisant pas partie des mêmes BCC.

Une autre « possibilité » est évoquée : celle de procéder aux évaluations en contrôle continu intégral, donc en supprimant les sessions d’examens semestrielles, y compris les sessions de rattrapage.

 

2) Réforme de la PACES

 

Toujours dans le même point de l’ordre du jour, a été présentée la future réforme de la PACES ( 1ère année de médecine).

Voici le topo: pour la rentrée 2020, la PACES sera supprimée pour être remplacé par une nouvelle filière sélective sans redoublement appelée « portail santé ». En cas d’échec en première année du « portail santé », la solution privilégiée est que les étudiant·e·s intègrent d’autres licences ayant une mineure santé (donc ça peut être n’importe quoi, de la sociologie au droit en passant par la chimie, tant que c’est une licence ayant une mineure santé ). Pour revenir ensuite en deuxième année du portail santé. Les étudiant·e·s ne voulant pas entrer ou non sélectionné·e·s en première année de portail santé mais voulant tout de même intégrer cette formation devront faire de même. Il faudrait aussi que ces étudiant·e·s intègrent une licence portail santé ayant une mineure correspondant à leur licence précédente (par exemple étudiant X qui vient de L1 sociologie mineure santé soit arriver ensuite en L2 portail santé mineure sociologie).

De ce que nous savons de cette réforme, cela est surtout un moyen d’interdire le redoublement en première année de médecine ( P1), sans s’attirer les foudres grâce à une forme de « passerelle » permettant l’accès en P2, pour des étudiant·e·s ayant un niveau L3 minimum minimum. Cela remet en cause tout le système d’équivalence des formations voulu par le système des crédits ECTS.

 

3) FSDIE et utilisation de la CVEC

 

La CVEC (Contribution Vie Etudiante et de Campus), vous vous souvenez? C’est ces 90 euros que les non-boursier.e.s ont du payer. C’est une forme de frais d’inscription qu’a rajouté Macron après la suppression de la sécurité sociale étudiante. Comme on économisait 200 euros, hop on n’allait pas râler sur 90 euros en plus. Cet argent est censé subventionner le FSDIE ( Fonds Social de Développement et d’Iniatives Etudiantes), qui se divise entre les projets des associations ( 70% du budget) et les aides sociales ponctuelles ( 30%). Ce taux, choisi par les universités, a été revoté, sachant que 30% est le maximum légal qui peut être alloué à la partie « aide sociales ». Passons d’abord en revue les points discutés autour de la FSDIE en général :

 

                                      3.1. Exonérations de frais d’inscriptions accordées aux étudiant·e·s et doctorant·e·s

Il existe à l’Université une « commission d’exonération des droits d’inscriptions » qui permet d’exonérer de frais d’inscriptions des étudiant.e.s, dans la limite de 10% des étudiant.e.s. Les critères dépendent de la « situation sociale et personnelle de l’étudiant.e » et étaient déjà votés, figurant notamment dans le code de l’éducation. Nouveauté de cette CFVU:   pour les étudiant·e·s étranger·e·s résident·e·s de moins d’un an, l’accord n’est pas systématique mais soumis à l’avis de la commission d’exonération. La commission a fait une proposition de modification pour élargir les possibilités d’exonérations (pour la campagne 2019-2020) aux étudiant·e·s de diplômes d’établissement ouvrant droit à bourse et dans les formations à distance car ces demandes d’exonérations ne pouvaient pas jusqu’alors être examinées car elles concernent des formations ne rentrant pas dans la catégorie des diplômes nationaux. On nous a fait remarque qu’entre septembre et février, la commission s’est réunie 5 fois pour essayer d’être réactive aux demandes.

La vice-présidente Université citoyenne, Emmanuelle Jourdan-Chartier, a quand même précisé que pour les doctorant·e·s ne fournissant pas de dossier justifiant une demande d’exonération sur critères sociaux, celle-ci est quand même accordée par défaut, à moins que le/la doctorant·e joigne des justificatifs de revenus et qu’iels se rendent compte que le/la doctorant·e n’a pas besoin de cette aide.

 

                                      3.2. Autres actions sociales FSDIE

La FSDIE finance également des prêts d’ordinateurs, ou encore des épiceries solidaires gérées en partenariat avec le CROUS, elles ont 50 bénéficiaires annuels en plus des ponctuels, qui ne sont présentes pour l’instant qu’en pharmacie et à Pont de bois mais il est en projet d’en ouvrir aussi à Roubaix et Cité scientifique. Toutes ces initiatives sont financées grâce à la partie aides sociales du FSDIE; l’idée étant que ces 30% doivent prioritairement aller aux étudiant·e·s faisant la demande d’aide sociale, le reste allant en bonus aux ordis et aux épiceries.

Emmanuelle Jourdan-Cartier a précisé que la commission aides sociales du FSDIE s’est réunie 8 fois l’année dernière afin d’être réactive au demandes des étudiant·e·s en cours d’année. Il y aurait aussi des problèmes à cause de la fusion, liés au manque d’harmonisation des pratiques entre les ex-universités ( sans blague?).

 

                                     3.3. Mais que faire de la CVEC?

Mais revenons à nos moutons : la CVEC. Sur les 90€ payés par chaque étudiant·e en formation initiale, 41 reviennent à l’université, soit un total d’environ 2.3 M€ pour l’UdL (Université de Lille).

La commission CVEC a proposé que 14€ sur ces 41 € aillent au FSDIE et 8 € au SIUUMPS (centre de santé des étudiant.e.s) et le reste à des projets de type FSDIE. Sauf qu’il ne s’agit pas d’initiatives étudiantes. On retrouve notamment la distribution de protections hygiéniques, les Monologues du vagin ( qui a coûté 19 000 €) et le Mix’cité extraordinaire du 4 avril. Des projets gigantesques, qui au final ont coûté presque 1.3 millions d’euros, et ont permis aux vice-président·e·s de faire leur com. Le doyen de la FSJPS a heureusement protesté, en rappelant que l’Université connaît de graves difficultés budgétaires et que les composantes n’ont pas été mises au courant de l’arrivée. Beaucoup se sont abstenu·e·s sur ce vote.

 

4) Autres points en vrac (tout aussi choquant) :

 

                                            4.1. Calendrier universitaire 2019-2020

Sur ce point, Lynne Franjié a remarqué que les interruptions pédagogiques n’étaient pas forcées pour les formations continues et en alternance (chouette). Un·e élu·e a expliqué que mettre en place la deuxième session d’examens (celle de rattrapage) du premier semestre en juin est catastrophique, au vu du taux de réussite, à cause du laps de temps qu’il y a entre juin et la fin du premier semestre.

Mais notre chère Lynne a répliqué qu’il était impossible de décaler la 2ème session du premier semestre à  décembre/janvier ou février puisqu’elle doit obligatoirement avoir lieu après les résultats du second semestre. Selon elle, les étudiant·e·s vont en rattrapage du premier semestre en fonction de leurs résultats au second (et doivent donc obligatoirement en avoir connaissance avant). Or si des étudiant·e·s allaient en rattrapage du premier semestre juste après les résultats du premier semestre, iels risqueraient de faire un recours contre l’université pour rattrapage forcé, (au cas où il s’avèrerait qu’au final, grâce aux résultats du second semestre ces étudiant·e·s n’en avaient pas besoin).

Mais, a-t-elle ajouté: lol, à partir de l’année prochaine tout ira mieux puisqu’il n’y aura plus de rattrapages du tout ! Le calendrier a donc été adopté à l’unanimité sauf notre abstention.

 

                                             4.2. Modalités d’admission dans les licences non cadrées nationalement

Ce point concerne l’entrée en licence pour les formations non cadrées nationalement par Parcoursup. Il existe un bornage entre le 1er février et le 1er septembre à l’intérieur duquel on laisse la formation toute seule organiser sa campagne d’admission ( notamment les DUT et les IAE ). Les étudiant·e·s passent par eCandidat pour être admis·e·s par internet, et qui est concerné·e selon l’année (iels parlent notamment des réfugié·e·s). Il s’agit d’un document de travail provisoire et rien n’a été adopté. Il existe des licences offrant des accès de droit, mais la plupart des acceptations sont soumises à des conditions, lorsqu’on sort du principe général que l’accès en deuxième et en troisième année de licence est de droit quand un étudiant progresse normalement.

 

                                              4.3. Modalités d’admission en M2

La dernière partie de ce point concerne les modalités d’admission en M2 (pas en M1 puisque dans ce cas c’est la sélection au master qui s’applique). Le conseil a listé les conditions d’acceptation pour le « public particulier » (un·e étudiant·e de chez nous changeant de master ou un·e étudiant·e venant d’une autre université) peut être admis·e. Avec la loi sur la sélection en master récemment adoptée, tout accès en M2 après l’obtention d’un M1 est normalement de droit (puisque toute sélection en M2 est censée être supprimée). Néanmoins, notre chère Lynne a commencé à parler de mettre en place des « capacités de sécurité » pour le M2 concernant le public particulier ne devant pas dépasser les capacités d’accueil du M1.

Son raisonnement étant: on accepte tout le public particulier s’il justifie l’obtention des matières nécessaires en M1 et tant que les capacités d’accueil du M1 ne sont pas dépassées. Il nous a donc semblé que dans le cas où les « capacités de sécurité » seraient dépassées, l’université devant alors discriminer qui est admis·e. Il s’agit donc d’une sélection déguisée. L’excuse de Lynne Franjié, il y aurait certains M2 où 300 dossiers seraient déposés sans qu’il soit possible d’admettre tout le monde.

 

5) Capacités d’accueil et application de la réforme du baccalauréat

 

                                                      5.1. Mise en place des capacités d’accueil

Les effectifs totaux se stabilisent suite à l’année dernière (une évolution de -0.5%). Dans l’ensemble LLCE (Langue, Littérature et Civilisation Etrangère), la baisse d’étudiant·e·s se fait en « pôle master et LANSAD ». Les DU ( Diplôme Universitaire comprenant de la formation continue, les formations payantes effectuées après l’entrée dans la vie active) n’ouvraient pas forcément tous les ans car ces formations dépendent des financements régionaux.

A ensuite été mentionné le dialogue de gestion avec le rectorat et le vote du CA (Conseil d’Administration) sur les capacités d’accueil (CAL). Le CA a voté des baisses de CAL moins importantes que celles votées auparavant par la CFVU car il avait peur d’une insécurité juridique au cas où cela entraînerait des divergences avec les CAL affichées sur Parcoursup. La rectrice a refusé les baisses votées sauf en Science politique et en AES où cette baisse des CAL est étalée sur deux ans, elle a accepté ces baisses graduelles malgré les consignes ministérielles, qui étaient de ne rien baisser.

 

                                                   5.2. Avant-goût de la réforme du bac

La réforme du baccalauréat supprime un « bac général » puisque les cursus seront différenciés par le choix de 3 options parmi 12 ( théoriquement, puisqu’elles ne seront pas disponibles dans tous les lycées).  La question posée par la Vice-présidente Formation étant : « quels profils de bachelier·e·s arriveront ? quelles spécialisations ? quels attendus devront nous faire en conséquence? ». Sans commentaire…

***

Cette CFVU, bien que semblant être un obscur conseil, est en fait le lieu où se modélise et s’appliquent les réformes de l’ESR prises par le gouvernement. Il est donc extrêmement important de s’y intéresser et surtout de se mobiliser contre l’application de ces mesures sélectives, discriminantes et élitistes.

Nous appelons donc les élu·e·s en conseils centraux ( CA et CFVU) à se mobiliser ensemble contre ces mesures, ainsi que tou·te·s les étudiant·e·s !

 

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