Pour le dernier Conseil d’Administration de l’année, nous étions préparé.e.s comme jamais. En effet, à l’ordre du jour nous avons réussi à mettre en place 3 de nos propositions. A force de réunions et d’échanges de mails avec l’administration et la direction, nous avons pu engager certains points de notre cahier de revendications du début d’année. Mais construire des petites réformes ce n’est pas le tout, il faut aussi les faire adopter. C’est pourquoi nos demandes initiales ont été plus que rognées afin de complaire à la majorité. Acceptées toutes les trois par le CA, nous ne sommes pas satisfait.e.s mais nous n’abandonnons évidemment pas le combat ! A ces petites avancées s’ajoutent des mesures plus sombres … comme la hausse des frais d’inscriptions. Retour sur un CA chargé.
Nos demandes partiellement validées par le Conseil d’Administration de Sciences Po Lille
Afin de faire passer votre revendication devant le Conseil d’Administration, il n’y a qu’un seul chemin : s’adresser à M. Mathiot. Elle devra ensuite lui complaire. Une fois qu’il l’a adoptée tout en l’adaptant à ses propres idées, elle sera inscrite au Conseil d’Administration. A partir de là on peut dire que c’est gagné, car si le roi a décidé de présenter une mesure de Solidaires étudiant.e.s au CA, l’assemblée suivra (n’en déplaise à nos camarades d’Avenir qui auraient bien voulu s’opposer à notre proposition de labellisation des associations politiques). L’ultra verticalité est toujours de mise sous le pouvoir de Mathiot, cependant on peut lui concéder d’être beaucoup plus à l’écoute que M. Lengaigne. Toutefois, passée par la machine à essorer de la direction, notre demande pour le RSE a été transformée en une réforme peu ambitieuse ne prenant pas en compte les salarié.e.s étudiant.e.s faisant moins de 8h par semaine, ainsi que les situations d’intermittence ou d’auto-entrepreneuriat. Cependant les étudiant.e.s de SPL pourront dorénavant demander le RSE à tout moment, ainsi que de nouvelles modalités d’évaluation adaptées avec leur enseignant.e. Notre demande pour la CAS a mieux tenu le coup : la commission devra allouer la totalité de son enveloppe et nous avons aussi assuré dans le règlement la transmission des documents auprès des élu.e.s afin de pouvoir mieux préparer la défense des étudiant.e.s. Enfin la labellisation des associations politiques est finalement passée dans son entièreté : les syndicats et les partis politiques pourront demander des subventions par projet présenté devant la CVA.
Sciences Po Lille sur le point de mettre fin au système de notes : une petite révolution pédagogique qui ne va pas assez loin
Après moult grognements, débats internes et révolutions de couloir, la direction a dû se rendre à l’évidence que son système de notation mixte du premier cycle entre lettres et chiffres, en plus d’être particulièrement obscur, ne fonctionnait pas et ne satisfaisait personne. C’est donc bien une petite révolution qui fut présentée à ce CA alors que ce système de notation fut remodelé : en effet, dans le nouveau système les chiffres disparaissent entièrement des textes. C’est à dire qu’un A ne correspond plus à un 16 et un B plus à un 14 mais les deux correspondent à certains niveaux « d’acquisition ». L’ancien F devient un E et fait important à noter : son caractère particulier est enfin écrit noir sur blanc ! Fini les enseignant.e.s qui décident de mettre des F quand bon leur semble, et il a fallu deux ans pour ça ! Le nouveau E ne sera donc légalement attribué seulement pour les copies blanches, frauduleuses ou plagiées. La suite logique de ces changements est qu’il n’y a plus de moyenne chiffrée et que les étudiant.e.s iront donc aux rattrapages différemment. Si le bloc a plus de 2 matières (il y en a 4 sur 2 semestres dans le cas des matières principales) , l’étudiant.e ne validera pas s’iel obtient un E ou deux D. Si le bloc a 1 ou 2 matières (comme par exemple pour les cours électifs de 2A) alors il suffira d’un E ou d’un D pour ne pas valider. Les rattrapages se feront par ailleurs par bloc et non plus par cours, réduisant significativement leur nombre.
Autre effet collatéral : il n’y aura plus de classement global pour la 3A pour la promotion 2024. Le nouveau système sera voté et présenté dans le futur. Mais pour les 2023 nous pouvons tout de même nous réjouir du retour au ratio de 70% pour le bloc général (hors langue) et de 30% pour les langues pour le classement. La surprésence des langues ici était en effet absurde et discriminatoire. En effet, parler plusieurs langues est une compétence plus facilement acquise dans les milieux socialement élevés.
Les bonnes nouvelles passées, attaquons-nous aux problèmes. Ce changement a beau être impressionnant par sa correction d’un système défectueux et confus, ce qui est la moindre des choses après 2 ans de réclamations, il ne change que très peu son fonctionnement profond. Il s’agit en effet toujours d’un système de notation mettant en concurrence les étudiant.e.s pour leur année à l’étranger. En plus d’évoluer dans un système angoissant qui consiste à se comparer sans cesse aux autres, des étudiant.e.s se retrouvent pendant un an dans des destinations dont iels ne veulent pas, parfois isolé.e.s et en détresse psychologique ou bien financière. De plus il est impensable d’imaginer que les notes reflètent un particulier mérite des étudiant.e.s, nous ne vous rappelleront pas vos cours de sociologie de première année. Une année d’études ne se subit pas à forces d’épreuves et de tests d’assiduité, c’est une année d’émancipation intellectuelle dans laquelle chacun.e choisit à quel niveau iel veut s’investir.
La direction n’a d’ailleurs pas pu supporter de voir disparaître une partie de l’élitisme sciencepiste. Tant qu’elle s’est empressée d’introduire des mentions élitistes inspirées d’autres écoles (Sciences Po Paris, Harvard) telles que « Summa cum laude » et « Magna cum laude » pour distinguer les meilleur.e.s de la promotion. Que celles et ceux voulant porter des titres d’empereurs romains s’avancent…
Une direction de l’IEP élitiste tiraillée entre les écoles privées et l’I-SITE
La direction aujourd’hui en place à l’IEP a énormément participé au bashing d’un certain syndicat étudiant qui complotait à propos d’une fusion avec l’Université de Lille et aurait en tête l’idée d’élire un enseignant “de gauche” à la tête de l’IEP. Tout de ce petit monde tient beaucoup à l’indépendance de Sciences Po Lille et à son image de marque. Il ne manquerait plus d’être rattaché à l’image de l’enseignement supérieur public et PRESQUE gratuite pour tou.te.s ! Or l’I-SITE, programme d’investissement de l’Etat, vise à mettre en concurrence les universités : celles qui sauront avoir les meilleurs labos de recherche et les meilleur.e.s chercheur.ses, celles qui sauront accepter des baisses de dotation ou effectueront des fusions réussites. Une belle opportunité pour gravir les échelons de l’excellence ! Cependant un camarade d’Avenir s’est soucié d’une possible absorption de l’IEP par l’UDL. Qu’il ne s’inquiète guère : M.Mathiot a déjà communiqué sur le futur partenariat avec l’école privé de l’EDHEC et démontre à l’Etat qu’il peut être indépendant financièrement de lui en augmentant les frais d’inscriptions de ses étudiant.e.s (augmentation de 10% de la tranche 7 à 11 et ajout d’une tranche à 4 000 euros).
Ecologie et inclusivité : quand l’école se réapproprie (mal) les luttes des étudiant.e.s
Les étudiant.e.s du Collectif Mobilisé pour le Climat de Sciences Po Lille se sont mobilisé.e.s afin de faire passer leurs revendications pour l’écologie au sein de l’institut. Voulant instaurer des mesures radicales dès maintenant, iels ont tenté le coup de force de faire instaurer une charte écologique. Signée par la plupart des étudiant.e.s, elle n’a pas été adoptée, car elle n’était même pas à l’ordre du jour, qui comprenait cependant la nomination d’une chargée de mission pour la transition écologique (décision prise seule par la direction sans vote du CA). Qu’en penser ? Sciences Po Lille semble être attirée par le greenwashing, se délectant de toutes ces babioles en plastiques mélangeant merchandising et révolution écologique niveau 0 (oui on parle des écocups “thirst for knowledge”)… En espérant que l’école octroie à cette chargée de mission les ressources nécessaires et lui permettre d’appliquer un maximum des revendications du collectif pour le climat, sinon cette nomination risque bien d’être inutile.
Dans la continuité des fausses bonnes idées, la chargée de mission pour l’égalité a rédigé une annexe de la Charte égalité de genre afin de pousser l’administration et la direction à écrire en inclusif (alors que la Charte a été signée il y a deux ans et qu’iels sont censé.e.s s’y tenir). Une sorte de memento pour expliquer l’écriture inclusive à celleux qui ne font pas l’effort de s’y intéresser. Or, beaucoup de choses ne vont pas selon nous : Sciences Po Lille choisit de recommander la double flexion, choix totalement binaire, et les accords de proximité et de majorité. Cette dernière solution a été proposée par nos militantes qui se sont retrouvé.e.s devant une chargée d’égalité qui aurait voulu abolir l’écriture inclusive. D’ailleurs elle n’a pas pris la peine de consulter BCBG pour sa rédaction même si elle mentionne avoir rencontré l’association au préalable. Annexe d’autant plus inutile puisque ce sont des règles qui ne devront pas s’imposer pour la communication de l’école contrairement à la féminisation des noms de métiers ou de fonction et les mots englobants (le corps professoral, la direction, etc). Toutefois cette annexe a eu le mérite de nous questionner sur ce caractère paradoxalement exclusif de l’écriture inclusive. En effet, elle peut mettre en difficulté les personnes en situation de handicap. La potentielle non-prise en compte de ces personnes dans notre propre communication est une question à résoudre. N’hésitez pas à nous donner vos avis.